Acclamation

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Acclamation. Cette manière d’exprimer son consentement était en usage à Athènes pour l’élection de quelques magistrats. On les nommait par acclamation, mais on ne manifestait son choix qu’en élevant les mains sans proférer de paroles. Les sénateurs romains acceptaient une proposition par acclamation, lorsqu’ils se rangeaient tous du côté du proposant, ce qui s’appelait ire in pedes alicujus. L’acclamation des barbares s’exprimait par un bruit confus de leurs armes, et en frappant leurs épées sur les boucliers.

Les acclamations se faisaient entendre dans les mariages ; c’était un heureux présage pour la destinée des époux. Lorsque les empereurs distribuaient un congiaire, le peuple faisait retentir des acclamations, et lui souhaitait de longues années :

Augeat imperium nostri ducis, augeat annos !

dit Ovide, Fast. I, 613.

Les acclamations étaient fort usitées parmi les soldats. 1° Lorsqu’ils élisaient un commandant, ils criaient : Dii te servent, imperator ! 2° Au moment où les armées s’ébranlaient pour combattre, ils criaient : Victoria ! 3° Après la victoire, ils nommaient leur chef imperator par acclamation. 4° Lorsqu’ils accompagnaient un triomphateur au Capitole, ils criaient : Io triumphe ! io triumphe ! ou bien :

De nostris annis tibi Jupiter augeat annos !

Les acclamations avaient lieu aussi quand les empereurs faisaient leur entrée dans Rome. On louait avec des acclamations répétées, telles que bene et prœclare ! ou belle et festive, nonpotest melius ! les auteurs qui lisaient leurs ouvrages dans les écoles, dans des salles de lecture publiques ou particulières. Ils avaient soin d’inviter des auditeurs et des acclamateurs pour les entendre lire ou décla- mer leurs compositions. C’était comme dans nos spectacles et dans nos athénées.

L’amphithéâtre retentit des premières acclamations. Ce ne furent d’abord que des applaudissements confus. Mais dès le règne d’Auguste, on en fit un concert étudié : les courtisans sont nés avec les cours. Un musicien donnait le ton, et le peuple, faisant deux chœurs, répétait alternativement la formule d’acclamation. Le dernier acteur qui occupait la scène donnait le signal des applaudissements par ces mots, valete et plaudite. Lorsque Néron jouait de la lyre sur le théâtre, Sénèque et Burrhus étaient alors les coryphées ou premiers acclamateurs ; de jeunes chevaliers se plaçaient dans différents endroits de l’amphithéâtre, pour répéter les acclamations ; et des soldats gagés à cet effet se mêlaient parmi le peuple, comme les agents de police dans nos fêtes, afin que le prince entendit un concert unanime d’applaudissements. Ces acclamations chantées, ou plutôt accentuées, durèrent jusqu’au règne de Théodoric.

L’entrée des princes et des hommes recommandables était accompagnée de longues et nombreuses acclamations. Sertorius fut reçu dans l’amphithéâtre avec des applaudissements répétés et de grandes acclamations. Le peuple romain, entendant réciter les vers de Virgile sur la scène, fut si touché de leur beauté, qu’il se leva d’un commun accord, se tourna du côté du poète, et le salua, comme il faisait à l’arrivée d’Auguste.

Cet usage passa du théâtre dans le sénat. Les sénateurs exprimaient leur consentement aux volontés de l’empereur par ces formules : Omnes, omnes, œquum est, justum est. L’un d’eux prononçait une formule d’acclamation, et tous la répétaient à l’envi. Trebellius rapporte une circonstance où ces acclamations furent répétées jusqu’à soixante-dix et même jusqu’à quatre-vingts fois. Brisson et Ferrari en ont recueilli un grand nombre. Les médailles nous en ont aussi conservé, et nous apprennent que le peuple faisait par acclamation des vœux solennels pour la conservation des princes, et qu’il les renouvelait tous les cinq, tous les dix, tous les vingt ans, etc.

Les acclamations ou plutôt les vociférations furent aussi un témoignage public de haine ou de mépris. C’est ainsi qu’après la mort de Domitien, le sénat, si soumis auparavant et si vil, se répandit en invectives contre ce tyran, et répéta, dit Suétone, les acclamations les plus injurieuses. Lampride nous a transmis dans la vie de Commode, ch. 17, quelques formules de ces acclamations.

L’acclamation ordinaire des Grecs était bonne Fortune ! Les chrétiens conservèrent l’usage des acclamations dans les églises et dans les conciles. La révolution l’a fait renaître parmi nous, et il a eu une grande influence sur sa marche et sur ses effets.