Aérage

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  • Charles Renier
  • Encyclopédie moderne

Aérage. L’homme ne peut se passer de l’air, à cause de l’oxygène que ce fluide peut seul fournir à ses poumons. Il le respire constamment, et on a calculé que, lorsqu’il se porte bien il absorbe, terme moyen, trente et un litres d’oxygène par heure ; or, comme l’air atmosphérique ne contient que 0,21 de son volume d’oxygène, il en résulte qu’il faut à l’homme environ cent cinquante litres d’air par heure ou deux mètres cubes par douze heures. Mais un homme ne pourrait exister pendant ce même espace de temps dans une chambre hermétiquement fermée, qui contiendrait ce volume d’air, qu’à condition de rejeter dehors, par un moyen quelconque, tout l’air qu’il aurait une fois respiré ; car, sans cela, l’air, vicié par sa respiration, s’y trouverait bientôt en assez grande quantité pour gâter tout le bon air qui lui resterait. Il ne pourrait plus y vivre après en avoir respiré plus d’un demi-mètre, parce que l’air n’est respirable qu’autant qu’il n’y a que le quart de son volume qui a déjà servi. Il faut donc qu’une chambre, où l’on doit rester douze heures, contienne au moins huit mètres cubes d’air ; et, toutes les fois que l’on veut qu’un appartement ne contienne pas plus d’un quart d’air irrespirable, il faut s’arranger pour en faire, entrer et sortir au moins dix litres par minute. Voilà les principes sur lesquels repose la nécessité de l’aérage, dans le cas ordinaire, c’est-à-dire dans celui où il n’y a dans l’air que l’on respire aucun principe contraire à la santé. Mais dans les salles de spectacle, où l’air est vicié non-seulement par la respiration des hommes, mais aussi par la combustion des lumières ; dans les ateliers où les ouvriers sont fort échauffés par leur travail, et continuellement en sueur ; dans ceux où ils sont exposés aux émanations délétères des vapeurs nitreuses, mercurielles, etc., et à l’aspiration des poussières du plomb, du cuivre, etc., il faut un renouvellement d’air bien plus énergique.

Tout le mécanisme des divers systèmes d’aérage repose sur la différence de densité de l’air à divers degrés de température. Si on suppose un tuyau courbé à ses deux extrémités, et à branches inégales, tel qu’un siphon renversé, dont la plus grande branche contienne de l’air plus chaud que l’atmosphère, cet air s’élèvera pour sortir du tuyau ; celui de l’autre branche viendra occuper sa place ; il sera lui-même remplacé par de l’air venu du dehors ; et, si celui qui afflue dans la grande branche est échauffé au fur et à mesure qu’il y arrive, il s’établira dans le tuyau un courant ascensionnel continu de la petite branche à la grande. Si, au contraire, l’air est plus froid dans la grande branche que dans la petite, le courant ira en sens contraire, et il sera, dans l’un et l’autre cas, d’autant plus rapide que la différence de la température de l’air dans les deux branches sera plus grande.

L’application de ce principe, qui est presque toujours facile dans nos habitations et dans nos usines, est souvent fort difficile dans l’exploitation des mines. En effet, quand une mine n’a qu’un puits, qu’une entrée, les travailleurs manquent d’air dès qu’ils sont parvenus à une petite profondeur. On est alors forcé, pour leur en donner, d’établir, jusqu’au fond de la mine, une suite de tuyaux hermétiquement fermés, qui forment, pour ainsi dire, la grande branche d’un siphon dont la galerie, où ces tuyaux sont placés, est l’autre branche, et où circule un courant très énergique quand on chauffe la partie supérieure de la conduite.

Quand la mine a une grande étendue, il convient mieux d’établir deux puits. Quand leurs orifices à la surface du sol sont à des niveaux différents, la température de l’air y est toujours différente, et il s’y établit un tirage très énergique, pourvu que la température de l’air de la mine ne soit pas égale à celle de l’atmosphère. Quand cet air est plus froid, le courant a lieu de bas en haut ; quand il est plus chaud, c’est le contraire qui arrive. Mais, quand il n’est ni plus froid ni plus chaud, le courant est nul ou presque nul ; et dans ce cas on est forcé d’établir un feu dans l’un des deux puits, de même qu’il eût fallu échauffer la conduite de tuyaux qu’on eût été dans la nécessité d’établir, s’il n y avait eu qu’un seul puits à l’exploitation.

Quand la surface du sol où est creusée la mine est plane, on établit sur l’un des puits une haute cheminée, afin d’élever ainsi l’orifice de ce puits au-dessus de celle du puits voisin. Cet artifice donne toujours un fort tirage. Quelquefois on se contente de donner aux puits des diamètres différents. Le plus large des deux contient une plus grande masse d’air qui se refroidit moins ou s’échauffe moins, selon les saisons, par le contact de la terre ; alors l’inégalité de température a lieu pour les deux puits et le courant s’établit. Quelquefois on est aussi forcé de refouler l’air dans la mine avec des ventilateurs et des pompes ; mais c’est là une nécessité extrême à laquelle on n’obéit que quand les moyens naturels sont épuisés. Dans tous les cas, une fois l’air arrivé dans l’exploitation, on le dirige dans les galeries où les hommes travaillent, ce que l’on fait en bouchant avec des déblais toutes les issues que le vide des travaux antérieurs pourrait lui fournir.

Nos habitations ont toujours un grand nombre d’ouvertures qui nous amènent abondamment l’air dont nous avons besoin. Dans l’hiver, ce fluide entre dans nos appartements par les portes et les fenêtres, et il en sort par les cheminées, où la chaleur du foyer détermine un courant d’une grande vitesse. En été, au contraire, c’est par la cheminée que l’air extérieur nous arrive, et comme il ne peut pas y passer en abondance, nous sentons le besoin d’ouvrir les portes et les fenêtres pour lui offrir un passage plus large. Quand une maison a plusieurs issues qui ne sont pas à la même exposition, l’air y circule toujours abondamment, parce qu’il s’établit un courant qui a pour cause la différence de température de ces diverses ouvertures. Le contraire a lieu pour les maisons dont toutes les portes et fenêtres sont tournées vers le même point du ciel.