Agami

  • Histoire naturelle
  • A. Duponchel
  • Encyclopédie moderne

Agami. L’agami ou oiseau-trompette, Psophia crepitans, (de ψοφείν, faire du bruit), a été rangé par Cuvier en tête de la tribu des grues, dans l’ordre des échassiers ; mais ses caractères sont tellement incertains, que chaque classificateur lui a assigné une place différente. L’agami est, en effet, un oiseau anomal, présentant des caractères appartenant à plusieurs familles, et ne pouvant, par conséquent, former qu’un genre de transition. Son bec, ses ailes, sa queue, le rapprochent des gallinacées ; mais ses pieds, qui sont ceux des échassiers, ainsi que ses dernières rémiges très développées et à de longues barbes décomposées, établissent entre lui et les grues des rapports évidents, d’après lesquels Cuvier a cru, avec raison, devoir le classer.

L’agami a 0m,6 environ de hauteur, sur 0m,7 de longueur. Son bec conique, de 0m,15, est d’un vert sale. Ses yeux, dont l’iris est jaune brunâtre, sont entourés d’un cercle nu et rougeâtre. Des plumes courtes et frisées lui recouvrent la tête et les deux tiers supérieurs du cou, dont le tiers inférieur est garni de plumes plus grandes, non frisées, et d’un violet noir. La gorge et le haut de la poitrine présentent une sorte de plastron de 0m,15 d’étendue, brillant des plus riches reflets métalliques ; le reste de la poitrine, le ventre, les flancs et les cuisses sont noirs. Le dos est noir vers le haut, d’un roux brûlé au milieu, et gris sur le reste de son étendue. La queue, qui ne dépasse point les ailes pliées, est noire comme celles-ci. Les jambes, de 0m,3, sont verdâtres ; les pieds, de la même couleur, sont robustes, et garnis d’ongles courts et pointus.

L’agami se rencontre à Cayenne et dans le reste de la Guyane, où le bruit rauque qu’il fait entendre fréquemment lui a fait donner le nom d’oiseau-trompette.

Nous n’aurions point consacré un article spécial à l’agami, si ses habitudes naturelles ne le rendaient des plus intéressants ; il est sans contredit, parmi tous les oiseaux, celui qui montre le plus d’instinct, et le moins d’éloignement pour la société de l’homme. Il paraît, à cet égard, être aussi supérieur aux autres oiseaux que le chien lui-même l’est aux autres quadrupèdes. Non-seulement l’agami s’apprivoise facilement, mais il s’attache même, avec autant de fidélité que le chien, à celui qui le soigne. Il vient au-devant de son maître, le suit ou le précède, avec les marques de la plus vive satisfaction ; il sait aussi témoigner son antipathie à ceux qui lui déplaisent, en les poursuivant à coups de bec. Sensible aux caresses, il vient présenter sa tête et son cou pour être gratté. Il arrive, sans être appelé, toutes les fois qu’on se met à table, et se rend maître du terrain en chassant les chats et les chiens, qui n’osent lui résister. Enfin, il prend dans le commerce de l’homme presque autant d’instinct relatif que le chien ; il arrive même, à Cayenne, qu’on lui donne à garder des troupes de canards et de dindons, et qu’il s’en acquitte à merveille. Dans la basse-cour, il fait rentrer aux heures habituelles les oiseaux qui lui sont confiés, puis va se percher sur le toit ou sur quelque arbre voisin. Il est à regretter que l’on n’ait point encore tenté l’introduction de cet oiseau en Europe, car sa force et son intelligence en feraient une bien précieuse acquisition pour nos basses-cours.