Alcool
- Encyclopédie de famille
Alcool. Depuis un temps immémorial on sait que les sucs de certains fruits donnent, dans des circonstances particulières, des liqueurs plus ou moins analogues au vin, et qui, comme lui, ont la propriété d’enivrer. Toutes ces liqueurs sont susceptibles de fournir par la distillation un autre liquide spiritueux qui porte le nom d’alcool, esprit-de-vin ou eau-de-vie. Ce liquide a des propriétés qui sont constamment les mêmes ; mais il en présente quelques-unes de particulières, selon l’espèce de liqueur fermentée d’où on l’a retiré, et qui permettent de distinguer son origine. C’est ainsi que l’eau-de-vie de mélasse ou rhum, celle de cerises noires ou kirsch-wasser, celle de grains, se distinguent de l’eau-de-vie de vin. Quelquefois la saveur particulière des liqueurs alcooliques les fait rechercher pour l’usage domestique, et n’offre rien que d’agréable ; d’autres fois elle présente des inconvénients auxquels l’habitude seule peut rendre indifférent. Ainsi les eaux-de-vie de pommes de terre et de grains ont une saveur âcre et brûlante ; celle de l’eau-de-vie de pomme de terre est due à un principe aromatique qui n’a pu en être isolé ; celle de l’eau-de-vie de grains l’est, au contraire, à une substance huileuse, dont l’âcreté est telle que quelques gouttes suffisent pour gâter une pièce de ce liquide. Comme cette huile est moins volatile que l’eau-de-vie, on peut la séparer par des distillations convenables, et enlever presque entièrement à l’eau-de-vie la saveur qu’elle devait à cette substance. L’alcool pur ne diffère de l’eau-de-vie que par la quantité d’eau que celle-ci renferme ; entendant on trouve une très grande différence de saveur entre un mélange d’alcool et d’eau et de l’eau-de-vie au même degré de force : cela peut tenir à une combinaison plus intime de l’eau et de l’alcool, ou à 1 existence d’une petite quantité de substance aromatique que renferme l’eau-de-vie, qui, en raison de sa moindre force, a été obtenue à une plus haute température.
L’alcool pur est un liquide incolore, d’une saveur forte et brûlante, d’une odeur agréable et d’une pesanteur spécifique de 0,792. Il brûle avec la plus grande facilité, en se décomposant en eau et en acide carbonique. Son pouvoir réfrigérant est considérable ; sa flamme ne laisse pas déposer de noir de fumée, comme le font d’autres substances très combustibles. Lorsqu’on mêle l’alcool pur avec l’eau, il se dégage de la chaleur ; mais si, au contraire, on le mêle avec de la neige ou de la glace pilée, il se produit un abaissement de température. Le froid le plus vif qu’on ait pu produire n’a pu solidifier l’alcool. La plupart des acides minéraux décomposent l’alcool et le transforment en éther. Il dissout le soufre, l’iode, le phosphore, les alcalis minéraux et végétaux et les sels déliquescents. Les résines, les huiles, les baumes, les savons, etc., s’y dissolvent en général facilement. On ne peut obtenir directement l’alcool anhydre par la distillation. Mais en laissant quelque temps l’alcool le plus concentré en contact avec une substance très avide d’eau, comme la chaux vive ou le chlorure de calcium, et distillant ensuite à une température très douce, on obtient un alcool plus fort. L’alcool bout à une température d’autant moins élevée qu’il est plus pur ; l’alcool absolu, ou anhydre, bout à 78°. L’eau-de-vie contient 50 à 52 pour 100 d’alcool. AS alcool rectifié contient de 66 à 70 p. 100 d’alcool. L’alcool absolu renferme 90 p. 100 d’alcool. Si l’on fait chauffer un mélange d’eau et d’alcool, il se séparera d’abord une portion de celui-ci mêlée d’une petite quantité d’eau ; à mesure que l’on avancera, la proportion de l’eau deviendra plus grande, et par conséquent l’alcool s’affaiblira, de sorte que les dernières portions seront à peine alcooliques. C’est sur ce principe qu’est fondé l’art de la distillation.
Quoique l’usage trop répété des liqueurs alcooliques présente des inconvénients graves pour la santé, il ne résulte pas d’accidents immédiats de leur emploi, tandis que l’alcool concentré pourrait en produire, et donner même la mort si on en avalait une quantité assez considérable. Affaibli et pris en petite quantité, il occasionne une chaleur plus ou moins vive à l’épigastre, une irritation plus ou moins grande du système nerveux, l’accélération de la circulation, en un mot une excitation générale. En grande quantité, il détermine l’ivresse, caractérisée par un coma profond, l’inflammation de l’estomac, etc., et il peut même déterminer la mort.
D’après M. Labourt, un alchimiste arabe ayant trouvé le secret de faire de l’eau-de-vie, la nouvelle liqueur prit le nom d’alcool, qui était celui d’une poudre que les femmes arabes employaient pour se farder le visage, parce que, comme cette poudre, elle colorait et enflammait le teint. Les Arabes connaissaient déjà au dixième siècle l’art d’extraire la partie spiritueuse des aromates par la distillation, ainsi que le prouve le nom arabe d’alambic resté à appareil au moyen duquel cette opération s’exécute.