Aliments

  • Technologie
  • Lenormand et Mellet
  • Encyclopédie moderne

Aliments. La conservation des substances alimentaires forme la base d’un art nouveau, qui a reçu de nos jours de grands perfectionnements. On a senti vivement l’utilité dont pouvaient être ces procédés, non-seulement pour la marine et pour les hôpitaux, mais encore pour l’économie domestique. Supposez les méthodes de conservation assez parfaites, nous pourrons jouir dans toutes les saisons des productions particulières à chacune : nous consommerons en hiver les produits abondants de l’été, et nous aurons dans la saison des fleurs les fruits succulents de l’automne. La nature, si variable dans ses bienfaits, tantôt si prodigue et tantôt si avare de ses biens, ne nous fera plus courir de chances funestes, parce que nous saurons, dans les années d’une abondance ruineuse, recueillir les produits superflus et les conserver pour les années de disette. Le commerce pourrait nous apporter les productions délicieuses des contrées équinoxiales, que nous goûterions dans toute leur fraîcheur ; et le même lieu réunirait les productions des climats brûlants de la zone torride avec celles des zones tempérées du nord et du midi. Mais les procédés de conservation des substances alimentaires ont présenté jusqu’ici beaucoup plus de difficultés que l’art de les produire. Dans ce dernier cas la nature agit avec nous et nous prête ses forces, tandis que dans l’autre nous luttons contre elle pour l’empêcher de détruire son propre ouvrage. Les productions du règne organique ne peuvent se conserver spontanément que dans l’état de vie ; une fois éteintes, elles subissent plus ou moins promptement la fermentation ou la putréfaction qui en dissocie les éléments et forme de nouveaux composés. Il faudrait donc, pour conserver les substances végétales ou animales, empêcher ou retarder le moment de cette altération spontanée qui finit par les détruire.

Parmi les causes qui tendent à accélérer la fermentation, on en a remarqué trois principales : la présence d’un ferment d’une nature particulière, celle de l’air ou de l’oxygène, et l’humidité. Si l’on supprime une de ces trois causes, la fermentation est empêchée, ou du moins l’altération des substances est considérablement retardée.

Le procédé de conservation des aliments en les privant d’humidité est connu et pratiqué depuis longtemps ; c’est ainsi qu’on dessèche les viandes, les fruits, les légumes qu’on veut conserver : mais cette méthode a le défaut d’altérer certaines substances, d’en rendre d’autres moins nutritives, et de leur enlever, dans tous les cas, leur fraîcheur naturelle.

La salaison et le fumage des viandes, quoique agissant d’une autre manière, produisent les mêmes effets ; et ces opérations ont de plus l’inconvénient de mêler à la matière alimentaire des substances hétérogènes et nuisibles, dont on ne peut les débarrasser à l’aide de lavages répétés que très imparfaitement et aux dépens de la substance nutritive, qui est entraînée en partie.

Un enduit qui serait imperméable à l’humidité et à l’air pourrait très bien conserver sans altération les substances solides qu’on en recouvrirait : c’est par un moyen de ce genre que l’on conserve aisément les œufs ; on les plonge dans de la cire fondue ou dans un lit de chaux, et on les retire revêtus d’un enduit mince de cire ou de chaux, qui suffit pour en empêcher la putréfaction. D’autres fois on se contente de les recouvrir de cendres.