Anabas
- Histoire naturelle
- Duponchel père
- Encyclopédie moderne
Anabas. Genre établi par Cuvier sur une seule espèce de poisson de l’Inde, très remarquable par les habitudes qu’on lui prête. En effet, Daldorff, lieutenant au service de la compagnie des Indes, qui l’a décrit le premier en 1797, sous le nom de Perca scandens, affirme avoir pris un de ces poissons en novembre 1791, dans la fente de l’écorce d’un palmier (Borassus flabelliformis). Ce poisson, déjà à 1m,70 au-dessus de l’eau, dit cet observateur, s’efforçant de monter encore ; dans ce but, il s’attachait à l’écorce par les épines de ses opercules, et fléchissait sa queue pour se cramponner par les épines de sa nageoire anale ; puis il détachait sa tête, allongeait le corps et parvenait par ces divers mouvements à cheminer le long de l’arbre. Le but de cette ascension, suivant Daldorff, était d’éviter d’être emporté par les vagues lors des grandes inondations, et de trouver dans l’aisselle des feuilles l’eau nécessaire à sa respiration, en attendant qu’il pût retourner dans le fleuve qui baignait le pied des arbres. Le missionnaire John fit un récit semblable à l’ichtyologiste Bloch ; mais M. le professeur Valenciennes pense que c’est la même histoire racontée par deux auteurs dont l’un l’avait apprise de l’autre. En effet, John était Danois comme Daldorff, tous deux habitaient Tranquebar et s’y occupaient de sciences naturelles. Cependant, M. Reinwardt, qui a vu de ces poissons à Java, a assuré n’avoir rien entendu dire qui puisse confirmer ce fait. Kuhi et Van Hasselt, Bolé et Maklot n’en ont jamais parlé, et M. Leschenault, qui savait l’histoire de Daldorff, nie cette habitude de l’anabas, et regarde le fait observé par le naturaliste danois comme un fait isolé. M. Dussumier, qui a vu dès milliers de ces poissons à Bombay, où tous les enfants vont les chercher dans les mares, n’a rien observé ni rien entendu raconter de semblable. Il serait bien étonnant, dit M. Valenciennes, qu’une habitude aussi merveilleuse eût échappé à tant d’observateurs habiles et actifs, si elle était constante chez ce poisson.
Toujours est-il que les anabas ont une organisation particulière qui leur permet de vivre longtemps hors de l’eau comme les anguilles de nos eaux douces et les doras d’Amérique. Aussi les jongleurs indiens ont-ils toujours de ces poissons avec eux pour en amuser le peuple. Du reste, c’est un poisson très petit, d’un vert sombre, rayé quelquefois de bandes plus foncées, d’une chair fade remplie d’arêtes, et qu’on ne mange qu’à cause des vertus médicinales qu’on lui attribue.