Ananas

  • Encyclopédie de famille

Ananas, plante vivace iutroduite eu Europe, en 1690, de l’Amérique méridionale, où elle est abondamment cultivée pour son fruit, qui, réunissant tout à la fois le parfum de la fraise, de la pêche, de la pomme de reinette et de la framboise, est sans contredit le plus délicieux de tous les fruits. Non moins remarquable par la beauté et l’élégance de son feuillage que par l’ensemble de la plante entière, l’ananas qui a accompli toutes les périodes de son accroissement se compose d’un faisceau de feuilles radicales, belles, longues, très nombreuses, divergentes, roides, creusées en gouttière, ordinairement de couleur verte ou glauque, quelquefois rouge-violette ou rose, et ordinairement armées à leurs bords d’épines plus ou moins prononcées. Du centre de ce premier groupe de feuilles naît une tige droite, charnue, robuste, .qui se termine par un second et beaucoup plus petit faisceau de feuilles : ce second groupe de feuilles est, appelé la couronne. Entre ces deux faisceaux, sur la tige, et immédiatement sous la couronne, il naît une grande quantité de fleurs sessiles, bleues, très rapprochées, serrées et agglomérées, dont lés ovaires se soudant à mesure que la floraison cesse, transforment ainsi, et au fur et à mesure que la floraison s’achève, cette agglomération de fleurs en une masse ayant, selon les variétés de l’ananas, la forme conique, pyramidale, ovale ou globulaire, de couleur ordinairement jaune ou de diverses autres couleurs, contenant une pulpe blanchâtre, sucrée, consistante, de la plus agréable acidité, du goût le plus exquis, de l’odeur la plus suave, appelée le fruit de l’ananas.

Ce fruit, qui est du poids de trois à six kilogrammes dans les contrées intertropicales, n’avait pendant longtemps pu être obtenu parmi nous d’un volume aussi considérable, ni d’aussi bonne qualité. Mais les amateurs et les cultivateurs de la France et de l’Angleterre sont parvenus à surmonter toutes les difficultés à cet égard, et obtiennent d’aussi beaux et d’aussi bons fruits d’ananas à Paris et à Londres que ceux de l’Amérique méridionale ; bien plus, la multiplication de l’ananas par les graines que contient son fruit a donné naissance à de nouvelles variétés.

On possède aujourd’hui cinquante-six variétés de l’ananas ; les plus estimées sont : l’ananas de la Martinique ou commun, le plus recherché par les confiseurs ; l’ananas Providence ; l’ananas Cayenne à feuilles lisses, dont le fruit pyramidal est très gros et très bon ; l’ananas Otaïti ; l’ananas Enville, auquel se rapportent quatre sous-variétés dont les fruits sont généralement très volumineux ; l’ananas pain de sucre, ainsi nommé à cause de sa forme ; l’ananas Reine Pomaré, qui offre un gros fruit de la forme et de la saveur de celui de l’ananas commun, etc.

On multiplie l’ananas par graines, œilletons et couronnes. L’ananas est essentiellement une plante de culture sous verre, et doit en toute saison être placé le plus près possible des vitraux, soit qu’on le cultive en serre chaude, en demi-serre, en bâche, dans de grands châssis dits à ananas, ou dans des coffres à melons.

Les ananas sont quelquefois attaqués par la cochenille des serres ou pou d’ananas, qui se loge à l’aisselle des feuilles. On fait cesser les ravages de cet insecte en le touchant avec de l’huile.

La culture de ce fruit a été introduite en Angleterre par Rose, jardinier de Charles II. On rapporte que ce fut en 1733 que Louis XV et sa cour savourèrent les deux premiers ananas qui fussent parvenus à maturité sous notre climat, où cette plante était cependant cultivée depuis 1690. Du reste, jusqu’en 1790, on ne voyait d’ananas que dans les jardins royaux et chez quelques grands seigneurs. Leur culture, imparfaite et entourée de mystère, ne faisait guère de progrès ; elle fut même oubliée pendant la Révolution et l’Empire ; mais Edi, jardinier au château de Choisy-le-Roi sous Louis XVI, en avait gardé la tradition. Quand, sous Louis XVIII, il fut appelé au potager de Versailles, pour diriger les cultures forcées, il initia dans celle des ananas des élèves qui bientôt surpassèrent leur maître. Enfin, depuis 1830 l’usage du thermosiphon a donné des résultats qu’il semble difficile de dépasser.

L’ananas figure sur nos tables sous forme de gelée, de crèmes, de glaces, et principalement en une sorte de salade dans laquelle on emploie le rhum ou le vin blanc, surtout celui de Champagne. Le suc de ce fruit, soumis à la fermentation, donne une boisson alcoolique trèsagréable, mais qui produit aisément l’ivresse. On prépare encore avec ce suc une sorte de limonade dont l’usage est heureusement indiqué contre les fièvres putrides ou ataxiques. Coupé par tranches et saupoudré de sucre, l’ananas constitue un aliment diététique très convenable après les maladies graves et notamment les inflammations des voies digestives. Avec les fibres qui proviennent des feuilles de l’ananas, on fabrique à Singapour des fils employés principalement pour les lignes et les filets de pèche.

On donne encore le nom d’ananas à l’une des six classes auxquelles on a rapporté toutes les espèces de fraisiers.