Anthropolithe

  • Histoire naturelle
  • Bory de Saint-Vincent
  • Encyclopédie moderne

Anthropolithe. Nous avons déjà vu, en parlant des restes des animaux fossiles et des animaux perdus, que ceux de l’homme ne se trouvaient jamais parmi les leurs, et que tous les ossements antiques qu’on avait rapportés à des squelettes humains appartenaient à divers reptiles. L’étude de l’histoire naturelle fondée sur l’anatomie a démenti les assertions à l’aide desquelles on croyait prouver un premier et grand cataclysme universel qui, en détruisant tous les êtres existants avant que le ciel châtiât la terre, eût confondu leurs restes dans les sédiments qui en résultèrent. Mais pourquoi chercher des preuves dans l’existence de quelques squelettes de nos pères, mêlés à ceux d’autres animaux ? L’absence de nos ossements parmi ceux des races qui nous précédèrent, selon les livres sacrés eux-mêmes, n’est-elle pas une meilleure preuve à l’appui de l’ordre de création établi par la Genèse ? Quoi qu’il en soit, sans répéter ce que nous avons dit de l’homo diluvii testis et theoscopos de Scheuchzer, nous dirons un mot des prétendus anthropolithes nouvellement découverts à la Guadeloupe. M, Kœnig en a publié une description accompagnée d’une bonne figure. Ces prétendus anthropolithes ont été trouvés sur une plage de la partie de l’île appelée la Grande Terre, dans une pierre fort dure, située au-dessous de la ligne des hautes marées, et formant, avec ce qui les entoure, des blocs comme séparés du reste de la masse et dont chaque squelette paraîtrait comme le noyau. La pierre, d’autant plus dure qu’elle est plus voisine du cadavre, dont elle est comme une tombe naturelle, est formée de grains arrondis ressemblant à des débris de corail, environnés d’une incrustation calcaire et luisante ; tout en indique la formation moderne. En englobant des corps humains, la matière calcaire environnante dilata les os de ceux-ci ; lorsqu’elle était dans un certain état de fluidité ; et Brongniart, dont le jugement est décisif sur ces matières, a prononcé qu’on ne peut pas conclure, des observations faites sur les prétendus anthropolithes de la Guadeloupe, que ces restes soient même des fossiles dans la rigoureuse acception de ce mot.

L’un des hommes pétrifiés dont il est question avait été extrait du sol qui le recélait, pour être envoyé en France, lorsque les Anglais, s’étant emparés de l’île où on le découvrit, le transportèrent à Londres ; on peut l’y voir encore, mais pour de l’argent, comme c’est la coutume pour tout ce qu’on expose sur les bords de la Tamise aux yeux des curieux. On en a cherché depuis sur les mêmes lieux, et un autre corps pétrifié, non moins bien conservé que celui qu’avait enlevé lord Cochrane, est parvenu à Paris, où les galeries du Muséum l’offriront, sans exiger de rétribution, aux regards des Anglais qui le voudront étudier. L’homme pétrifléde la Guadeloupe, qu’on doit aux soins du gouverneur de la colonie, fut présenté à l’Académie des sciences par Cuvier, qui, dans un rapport lumineux, confirma les idées de Brongniart.