Javanais

  • Dictionnaire infernal

Javanais. Nous empruntons aux Études sur les Indes d’un résident néerlandais quelques détails sur les superstitions des Javanais idolâtres : Ils ont une foi entière aux songes, aux présages, divisent les jours en heureux et malheureux, jettent le sort à la naissance, croient aux dons surnaturels, à l’invulnérabilité, à la sorcellerie, aux enchantements, aux charmes, aux philtres. Rocs, forêts, montagnes, cavités, abîmes, tout est, selon eux, habité par des êtres invisibles ; et, ne se bornant point aux rêves de leur cerveau malade, ils ont adopté tout ce que le continent de l’Inde, l’Arabie, la Perse, présentent d’êtres merveilleux. Grands et petits, princes et paysans, ont la même crédulité. Heureusement tout cela est dépourvu le plus souvent de malice et d’artifice ; mais quelquefois leur aveuglement, excité par des motifs puissants, les pousse aux excès les plus coupables et les plus dangereux.

Entre les pratiques les moins à redouter, je citerai la suivante. Il est d’usage parmi les voleurs, à Java, d’exorciser, pour ainsi dire, la maison qu’ils ont dessein de piller ; à cet effet, ils jettent contre les murs, et même, s’il est possible, jusque dans le lit des habitants, une certaine quantité de terre tirée d’une fosse nouvellement creusée, afin d’y introduire un sommeil léthargique : après quoi ils volent avec la plus parfaite sécurité. Cette croyance n’est point bornée aux seuls larrons ; leurs victimes la partagent également. Ils mettent précieusement en réserve de la terre préparée pour cette opération, et souvent, dans les tournées que mes fonctions me forçaient de faire pour réprimer les déprédations, les voleurs que j’ai interrogés m’ont expliqué comment ils s’en servaient.

L’ancien code de Java, encore en vigueur à Bali, est rempli de lois contre la sorcellerie, et prouve jusqu’à l’évidence les funestes effets de la superstition sur l’esprit d’un peuple ignorant et entêté. En voici quelques extraits : « Si l’on écrit le nom d’un individu quelconque sur un drap mortuaire, une bière, une figure de pâte, ou une feuille, et ensuite si l’on enterre cet objet, si on le suspend à un arbre, si on l’expose sur la voie publique, ou au milieu de deux chemins qui se croisent, il y a sorcellerie. — Si l’on écrit le nom d’un individu quelconque sur un ossement, soit de la tête, soit de toute autre partie du corps, et qu’après avoir employé pour cette opération un mélange de sang et de charbon, on le place sur le seuil d’une porte, il y a sorcellerie. — Quiconque use de sortilèges, sera condamné à mort par le juge, et si la chose est prouvée d’une manière évidente, la peine de mort s’étendra sur les parents, les enfants, les petits-enfants du coupable, sans qu’aucun puisse en être excepté. — Qu’il ne soit point permis aux criminels convaincus d’une telle abomination de souiller plus longtemps la terre parleur présence ; que leurs propriétés de toute espèce soient confisquées ; que les parents et enfants du sorcier soient relégués dans la partie la plus reculée du pays, et s’ils prennent la fuite, qu’ils soient punis de mort ; que leurs biens soient, dans tous les cas, recherchés et confisqués. »