Kalmouks

  • Dictionnaire infernal

Kalmouks. Les Kalmouks rendent hommage à deux êtres puissants : au génie du bien et au génie du mal, sacrifiant sur le sommet des

montagnes, sur les bords des rivières, ou dans l’intérieur des cabanes, à l’un comme à l’autre, mais le plus souvent à la divinité malfaisante, parce qu’ils jugent nécessaire de la fléchir et d’apaiser son courroux. Le soleil, ou, comme ils l’appellent, l’œil de Dieu, est pour eux l’objet d’un culte particulier. Quelque dégénérée que soit cette fausse religion, on reconnaît cependant le rapport qui existe entre elle et l’une des plus anciennes, celle des disciples de Zoroastre, qui avait étendu son influence non-seulement sur l’Inde et la Perse, mais encore sur les peuples nomades des steppes mongoles ; et nous voyons encore de nos jours des tribus, telles que les Kalmouks, qui en ont conservé le souvenir pendant une suite de siècles.

Les Kalmouks, dans le département de Stawropol (Russie), célèbrent l’entrée de la nouvelle année par des sacrifices et des prédictions qui sont dans les attributions des geljunes, prêtres et devins. Pendant la nuit qui précède le nouvel an, chaque Kalmouk allume une lampe devant son idole et, quand ses moyens le lui permettent, va trouver le gelj une pour se faire prédire ce qui arrivera dans l’année. Le geljune, assis gravement sur un tabouret, examine les entrailles d’un agneau, parcourt ses tables astrologiques et répond aux questions qui lui sont posées par des paroles à double sens. Là ne se bornent point ses fonctions. Il doit annoncer aussi quel temps il fera pendant l’année, si les récoltes seront bonnes, etc.

Au reste, il faut avouer que les Kalmouks sont d’excellents prophètes en ce qui concerne le temps. Il y a quelques années, un Kalmouk qui passait par la ville de Stawropol prédit deux ou trois semaines avant Pâques que ce jour-là il tomberait de la neige.

C’était dans les derniers jours du mois de mars (ancien style) ; le temps était superbe, les prés commençaient à verdir, les arbres à bourgeonner. On le traita de fou ; et comme il s’en allait dans le bazar, criant : À Pâques, de la neige ! de la neige à Pâques ! on l’arrêta, en lui promettant que, s’il disait vrai, on lui compterait 25 roubles ; mais que, dans le cas contraire, on lui administrerait une correction exemplaire. Le temps resta comme il était ; mais le dimanche de Pâques, vers dix heures, voilà tout à coup qu’un léger vent nord-ouest se met à souffler, devient plus intense, et, à onze heures, éclate une véritable tempête de neige, qui força les habitants de Stawropol à s’envelopper de leurs plus chaudes pelisses. Au lieu de 25 roubles, le Kalmouk en reçut 75.

Aujourd’hui, comme au moyen âge, les Kalmouks ont des schamanes qui, abusant de leur crédulité, leur persuadent qu’ils possèdent un empire magique sur une foule de génies invisibles dont ils se disent accompagnés et qui leur révèlent l’avenir et les choses secrètes. Comme au moyen âge, le mort et même le malade leur inspirent une horreur qu’ils n’ont garde de cacher. Après avoir placé près de lui tout ce dont il peut avoir besoin à leur avis, ils s’éloignent du malade, fut-ce leur père ; la couche du mourant, s’il est riche, est gardée tout au plus par un schamane ; la famille se contente d’envoyer de temps en temps demander de ses nouvelles. Cette indifférence inhumaine ne les empêche pas de rendre après la mort tous les honneurs possibles à celui qu’ils viennent de perdre. Le défunt, vêtu de ses plus beaux habits, est quelquefois enterré au fond des bois, avec son arc et ses flèches, sa pipe, sa selle et son fouet. D’autres suspendent leurs morts dans des couvertures de feutre au haut des arbres les plus élevés ; d’autres enfin en brillent les restes mortels sur un bûcher pour garder leurs cendres. Dans ce cas le cheval favori, du défunt est brûlé avec lui. Ce sont encore les mœurs dont parlent les chroniques et les voyageurs du moyen âge. En général cette peuplade offre jusqu’à présent l’image fidèle de ce qu’étaient les Mongols à une époque malheureusement trop glorieuse pour cette nation, lorsque, conduits par Tchinguis-Khan, ils portèrent de victoire en victoire la terreur et la désolation jusqu’au centre de l’Europe, jusque dans les plaines riantes de la Silésie. — (Voyez : Kosaks).