Acclimatement
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Acclimatement. Un animal ou un végétal est dit acclimaté, quand il parvient à vivre et à se reproduire dans un pays auquel la nature ne l’a point destiné, après y avoir été transporté, soit fortuitement, soit par la volonté de l’homme. Or, cet acclimatement ne peut avoir lieu sans que la constitution de l’être qui s’y trouve soumis éprouve des changements d’autant plus grands, que sa nouvelle patrie ressemble moins à l’ancienne. En effet, il existe, entre le sol et les êtres organisés qui l’habitent, les mêmes rapports qu’entre la cause et l’effet ; et ceux qui n’y sont pas nés n’y peuvent vivre qu’à la condition de se modifier pour se mettre en harmonie avec lui. De là les difficultés qu’éprouvent certains acclimatements qui ne réussissent qu’avec le temps et beaucoup de soin ; de là l’impossibilité de naturaliser dans notre Europe, à cause de son climat généralement plutôt froid que chaud, les productions des contrées intertropicales ; car on ne peut considérer comme acclimatés les végétaux élevés en serre chaude, qui périssent à l’air libre, ni les animaux que nous tenons en chartre privée dans nos ménageries et nos habitations, et qui ne tardent point à mourir de faim ou de froid, s’ils sont abandonnés à eux-mêmes. Il n’est donc question ici que de ceux qui, après avoir subi l’épreuve d’un climat étranger pour eux, finissent par s’y habituer, au point de pouvoir y vivre et s’y propager comme dans leur propre pays.
Comment s’opère cet acclimatement ? Nous l’avons déjà dit, c’est parce que l’animal ou le végétal dépaysé éprouve dans son organisation des modifications qui l’identifient en quelque sorte avec sa nouvelle habitation ; et ces modifications seront d’autant plus grandes que les différences seront marquées entre l’ancienne et la nouvelle habitation de l’être transplanté.
Ce n’est point ici le lieu de traiter des différents climats, soit qu’on les considère sous le rapport de la température, qui dépend, comme on sait, de la latitude, de l’élévation du sol, de l’abondance ou de l’absence d’eaux courantes ou stagnantes, du boisement, du voisinage de la mer, de la direction des montagnes, etc., etc. ; soit qu’on les considère d’une manière absolue, en appelant climat une certaine portion de la terre, une zone comprise entre deux cercles parallèles à l’équateur. Il nous suffira de dire que le mot climat, dans son sens le plus général, et c’est celui que nous adoptons ici, il nous suffira de dire que le mot climat comprend la température, la lumière, l’électricité, l’humidité, les mouvements de l’air, la nature du terrain, la position des lieux, les productions du sol et la culture des terres. Tels sont les objets principaux qui constituent le climat ; et leur influence réciproque est telle, que la nature, et, par conséquent, l’influence du climat, varie selon que l’un ou l’autre de ces éléments vient à prédominer.
Tout le monde sait ce qui arrive quand une plante est arrachée du lieu de sa naissance : elle commence par ressentir quelques effets de souffrance ; puis, prenant le dessus, elle revêt une physionomie et des propriétés en harmonie avec la localité où elle est transplantée. Il arrive même quelquefois que cette transition s’opère presque insensiblement et sans secousse. La nature elle-même nous en offre des exemples. Une plante de la famille des algues, l’ulva compressa, devient, suivant les localités, plante marine, plante d’eau douce ou plante terrestre. Jetée dans les terres par les hautes marées, elle végète dans quelques flaques saumâtres, puis dans des ruisseaux d’eau douce, où elle devient ulva confervoidea. Que l’eau disparaisse, elle se transforme en ulva terrestris ; et, dans ces trois variétés, elle change non-seulement de port et l’aspect, mais même d’organisation intérieure, puisque, sous chacune de ces trois formes, elle habite un milieu différent.
Les animaux ne subissent pas des effets moins marqués de ces sortes de translations ; mais les observations de ce genre sont peu nombreuses. Les naturalistes voyageurs, qui, tout en nous enrichissant de toutes les productions du globe, nous en ont fait connaître la géographie zoologique, ont, généralement, négligé la question des acclimatements. Il faut cependant en excepter M. le docteur Roulin, qui, pendant un séjour de plusieurs années en Amérique, a observé les changements opérés dans les animaux domestiques transportés de l’ancien monde dans le nouveau. Ses observations, pleines d’intérêt, sont consignées dans un mémoire lu par lui, le 29 septembre 1818, à l’Académie des sciences. Ce savant naturaliste rapporte que les oies et les paons transportés en Colombie éprouvèrent dans les premiers temps une grande difficulté d’acclimatement ; les pontes, rares, n’étaient composées que d’un petit nombre d’œufs, dont un quart à peine venait à éclore ; plus de la moitié des jeunes oiseaux mouraient dans les premiers mois. Plus tard les générations s’améliorèrent, et aujourd’hui les deux espèces diffèrent peu, pour la fécondité, de celles d’Europe.
À Cusco et dans toute sa vallée, on fut plus de trente ans sans pouvoir obtenir de poulets ; aujourd’hui cependant la race primitivement amenée est devenue féconde ; mais la race anglaise, amenée depuis peu d’années, n’en est pas encore arrivée à ce point, et l’on s’estime heureux d’avoir deux ou trois poussins sur toute une couvée. On remarque d’ailleurs des différences fort curieuses entre les deux races : le poulet créole, dont les pères vivent depuis longues années sous une température qui ne descend jamais au-dessous de 20°, naît couvert d’un léger duvet que, bientôt même, il perd ; et il reste complètement nu, à l’exception des plumes des ailes, qui croissent comme à l’ordinaire. Le poulet de race anglaise, au contraire, naît couvert d’un duvet bien serré, qui ne disparaît qu’à mesure qu’il est remplacé par des plumes ; le petit animal est encore velu, comme s’il devait vivre dans le pays d’où ses pères ont été apportés depuis peu d’années.
Le chat a éprouvé peu de modifications depuis son importation dans la Nouvelle-Grenade, au temps de Christophe Colomb ; elles se bornent à l’irrégularité des époques de reproduction et à la perte du miaulement ; l’animal est, du reste, le même qu’en Europe. Quant aux autres mammifères, les observations manquent de précision, à cause de l’influence qu’exerce l’homme sur les animaux domestiques, en les protégeant contre l’action du climat. Néanmoins, on a remarqué que, dans les contrées chaudes de l’Amérique, il est très difficile d’élever des agneaux, et que les brebis y sont peu fécondes. Le climat produit des effets remarquables sur la toison de ces animaux. Si la main de l’homme la respecte, la laine s’épaissit, se feutre, et finit par se détacher par plaques, qui laissent au-dessous d’elles, non point une laine naissante, non point une peau nue et dans un état maladif, mais un poil court, brillant, bien couché, et tout à fait semblable à celui de la chèvre dans ces mêmes contrées ; aux places où pousse ce poil, la laine ne reparaît jamais.
Il résulte, en somme, du travail de M. Roulin, que les animaux domestiques transportés en Amérique à l’époque de la découverte ont fini par s’y acclimater, et que leur fécondité est devenue telle, que leur nombre prodigieux a rompu leurs habitudes de domesticité, et que la plupart ont repris la vie sauvage. Cette circonstance a produit de nouvelles modifications : les oreilles du porc se sont redressées, son crâne s’est élargi ; l’agilité du cheval s’est développée ; le courage de l’âne a reparu ; la vivacité de la chèvre s’est accrue ; enfin, le pelage, perdant ses variétés dans chaque espèce, est devenu uniforme pour chacune d’elles. Ici se trouve la contre-épreuve de la proposition avancée par M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire, d’accord en cela avec Buffon : que les nombreuses variétés du cheval, du porc, de la chèvre, etc., ne sont que des produits de la domesticité.
Voici, maintenant, des faits qui prouvent que deux contrées n’ont pas besoin d’être éloignées l’une de l’autre pour produire des races différentes dans les animaux domestiques, puisque les faits se passent chez nous et dans deux provinces limitrophes. Les chevaux et les bêtes à cornes, transportés de Bretagne en Normandie, acquièrent une taille plus élevée et les caractères de la race normande ; tandis que le contraire a lieu pour les animaux transportés de Normandie en Bretagne, où ils deviennent généralement plus petits, quoique également bien nourris dans les deux provinces. On voit par là que l’abondance de la nourriture et les autres soins ne suffisent pas pour empêcher la dégénération des races, et qu’il faut surtout en chercher la cause dans l’action du climat. C’est ainsi que l’Amérique, qui ne manque point de fertilité, et dont la végétation, dans certaines parties, est plus vigoureuse que dans toute autre partie du globe, présente néanmoins des races d’animaux plus petites que l’ancien continent, et que la taille de ceux qu’on y a importés n’a pas tardé à décroitre.
Il est donc évident que, d’une part, les formes organiques sont modifiées par les agents extérieurs chez les êtres qui ont acquis leur développement, et que, de l’autre, la génération finit par transmettre ces mêmes modifications. Cependant l’acclimatement ne réussit pas toujours ; bien que le climat ait une grande influence sur l’organisme, celui-ci résisté souvent ; il arrive même qu’il succombe dans la lutte. Dans tous les cas, on voit se développer des réactions maladives qu’il importe de connaître. Le père Laliat, pendant son séjour à la Martinique, avait déjà observé la nécessité de n’opérer les changements de climat que graduellement et par stations intermédiaires, afin de prévenir les accidents produits par de trop brusques transitions. Ainsi la vigne, importée directement de France dans nos colonies des Antilles, eut bien de la peine à s’y naturaliser, tandis que le muscat, venu de Madère et des Canaries, y mûrit complètement dès les premiers temps. Le même voyageur fait observer que le temps est parfois une condition indispensable pour accomplir certains acclimatements ; il l’expérimenta lui-même sur des pois envoyés de France : les premiers semés rapportèrent très peu, les seconds davantage, et les troisièmes, enfin, produisirent une récolte extraordinaire pour l’abondance et la grosseur. Il en fut de même du froment : ce ne fut qu’aux secondes semailles, faites avec des grains mûris dans le pays, qu’on obtint des épis bien fournis.
Les observations de ce genre, sur les animaux d’un ordre inférieur, ont été négligées jusqu’à présent ; et fa raison en est que les acclimatements ont été toujours tentés dans un but d’utilité, et jamais dans des vues scientifiques. Il ne sera donc pas sans intérêt de rappeler ici les expériences de M. Beudant sur les mollusques. Quelques-uns de ces animaux pris dans des eaux douces, et placés immédiatement dans de l’eau salée au degré de celle delà mer, ne tardaient point à périr ; mais si on les mettait graduellement dans des eaux de plus en plus salées, l’acclimatement, si on peut ici employer ce mot, avait lieu, avec quelques différences relatives aux espèces soumises à cette épreuve. Les mêmes résultats furent observés sur des mollusques marins plongés dans de l’eau douce ; avec cette seule différence que les espèces vivant sur des rochers couverts et découverts alternativement par la marée, et souvent hors de l’eau par conséquent, résistèrent plus longtemps à l’effet de l’immersion brusque dans l’eau douce. L’acclimatement gradué, au contraire, réussit fort bien ; M. Beudant conserva des patelles, des arches, des huîtres, des moules et des balanes bien portantes, en compagnie de planorbes et de lymnées. Cet observateur fit plus : il parvint à faire vivre, dans des eaux chargées de 0,31 de sel, des mollusques vivant dans la mer, qui n’en contient que 0,04. La formation des cristaux a été la dernière limite de l’acclimatement.
On peut conclure de tout ce qui précède, que l’acclimatement des animaux et dès végétaux, opéré par l’homme, est une victoire remportée sur la nature. Néanmoins, la nature ne se laisse pas toujours subjuguer, et lui-même en fournit la preuve, comme nous le verrons plus loin.
Il serait trop long d’ënumérer ici tous les végétaux naturalisés en Europe par les soins de l’homme, soit pour son utilité, soit pour son agrément ; nous nous bornerons à citer les principaux. On sera peut-être surpris de voir le blé placé en tête : le fait est que l’origine de cette céréale est des plus incertaines ; cependant l’analogie porte à croire qu’elle vient de la haute Asie, comme l’épeautre, l’avoine et l’orbe, qui sont bien certainement originaires de cette contrée. Nous nommerons après : le maïs, improprement appelé blé de Turquie, puisqu’il vient d’Amérique, et dont l’introduction en Europe date du seizième siècle ; le pêcher, l’amandier, l’abricotier, le prunier, le cerisier, qui nous viennent de la Perse et de l’Arménie ; l’oranger, originaire de la Chine, et qui se cultive en pleine terre en Portugal, en Espagne, en Provence, en Italie, et dans d’autres parties de l’Europe méridionale ; la fève commune, indigène des bords de la mer Caspienne ; le haricot, qui provient des Indes-orientales ; le chanvre, qui a pour patrie la Perse ; le lin, qui croît naturellement sur le plateau de la Tartarie ; le tabac, importé de l’Amérique depuis deux siècles, et dont l’usage se répand chaque jour de plus en plus ; enfin la pomme de terre, la plus utile des plantes, après le blé, pour la nourriture de l’homme, puisque ses tubercules remplacent le pain dans tous les pays qui se refusent à la culture des céréales. Son acclimatement en Europe, qui ne remonte pas à plus d’un siècle, est un des plus grands services rendus à l’humanité. Originaire du Chili, où elle croît à l’état sauvage dans les environs de la ville dela Conception, la pomme de terre est cultivée aujourd’hui sur toute la surface du globe. Grâce à sa constitution robuste, elle s’accommode de tous les climats, depuis les tropiques jusqu’aux contrées arctiques ; le sol et l’exposition lui sont également indifférents. Cependant elle vient mieux, et ses tubercules sont plus farineux dans une terre à la fois grasse et sablonneuse, que dans un terrain humide et glaiseux.
Dans cette énumération, nous n’avons compris ni l’olivier, ni la vigne, puisque tous deux croissent spontanément, en Europe, à l’état sauvage. Cependant, si l’on en croit le témoignage des historiens de l’antiquité, la vigne serait originaire des environs de Nysa, dans les Indes, d’où elle aurait été transportée dans les autres contrées par Bacchus, qui la cultiva le premier. Les Phéniciens l’introduisirent ensuite dans les îles de l’Archipel, en Italie, et jusque dans.les Gaules, à l’époque de la fondation de Marseille par les Phocéens. Ainsi les pieds de vigne sauvage que l’on trouve dans les haies et les bois du midi de la France, où on la désigne sous le nom de lambrusque, ne seraient que des individus échappés des vignobles, et ayant repris l’état de nature.
Quoi qu’il en soit de l’origine de la vigne, il est certain qu’elle est cultivée aujourd’hui, non-seulement dans toute l’Europe méridionale et tempérée, mais encore sur beaucoup d’autres points du globe, tels que l’île de Madère, les Canaries, le cap de Bonne-Espérance, certaines contrées de l’Amérique et la Nouvelle-Hollande, où elle a été importée tout récemment ; or, une culture aussi répandue, et dans des pays aussi divers, n’a pu avoir lieu sans que la constitution de ce précieux arbuste ait éprouvé des modifications aussi variées que les climats qu’elle habite aujourd’hui.
À l’égard des plantes d’agrément qui embellissent nos parterres, il faudrait les citer presque toutes, si l’on voulait désigner celles que les soins de l’horticulteur ont acclimatées en Europe. À l’exception, peut-être, d’une cinquantaine de plantes ou d’arbustes, en tête desquels il faut placer le rosier, produit de l’églantier, tout le reste est exotique.
Quant aux animaux acclimatés en Europe par les soins de l’homme, le nombre en est peu considérable ; il se réduit à quatre espèces parmi les quadrupèdes : ce sont le cheval et l’âne, tous deux originaires des steppes de la Tartarie, où ils vivent encore à l’état sauvage ; le buffle, originaire des climats les plus chauds de l’Asie et de l’Afrique, et qui fut, vers la fin du seizième siècle, introduit en Italie, où il sert au labourage, concurremment avec le bœuf ; enfin, la chèvre, issue de l’œgagre, qui habite les endroits les plus escarpés du Caucase et des montagnes de la Perse. À l’égard des autres quadrupèdes domestiques, on ne peut les considérer comme ayant été acclimatés en Europe, puisqu’ils en sont originaires : tels sont le bœuf, dont le type est l’auroch, qui se rencontre encore, dit-on, dans les forêts de la Lithuanie ; le mouton, qui a pour souclte le mouflon de Corse et de Sardaigne ; le cochon, qui n’est autre chose que le sanglier rendu domestique ; et enfin le chat, qui existe dans les bois à l’état sauvage.
C’est à dessein que nous avons omis le chien dans cette liste : fidèle compagnon de l’homme, il est, comme lui, cosmopolite ; et par cela même les naturalistes ne peuvent lui assigner une patrie primitive, en admettant même que ses nombreuses variétés se rapportent toutes à une seule espèce.
À l’exception du pigeon commun, dont le type est le biset, qui vit dans nos bois ; à l’exception encore du canard, de l’oie et du cygne, tous trois originaires du nord de l’Europe, tous nos autres oiseaux domestiques ont été acclimatés : les poules viennent des Indes orientales ; le paon et le faisan, de l’Asie ; on sait que le dindon tire son origine de l’Amérique, et que son introduction en Europe est due aux jésuites ; la pintade, enfin, est africaine.
Nous n’avons parlé jusqu’à présent que des acclimatements dus à l’industrie de l’homme : pour compléter cet article, il nous reste à dire un mot de ceux qui, dans le règne végétal, se sont opérés sans lui et souvent malgré lui. Nous citerons donc, comme s’étant acclimatés spontanément : 1° l’agave americana, qui s’est tellement multipliée sur tout le littoral de la Méditerranée, où elle croît sans culture, que l’on en fait des baies, et qu’avec les fibres de ses feuilles on fabrique des cordages et des toiles grossières d’une grande solidité ; 2° l’erigeron canadense, plante de l’Amérique septentrionale, ainsi que l’indique son nom ; elle infeste tous les terrains incultes ou en friche de nos contrées, au point d’en exclure les plantes indigènes.
Le règne animal fournit aussi quelques exemples d’acclimatement spontané. Nous mentionnerons, parmi les plus remarquables, celui du cheval, en Amérique. Ce quadrupède, inconnu dans ces contrées avant la conquête des Espagnols, s’y est multiplié à l’état sauvage dans une telle proportion, que maintenant il y est plus commun que dans l’ancien continent. Cette rapide propagation s’explique par les vastes solitudes de l’Amérique ; solitudes qui offrent la plus grande analogie avec les steppes de la Tartarie, véritable patrie du cheval : telles sont les pampas de Buenos-Ayres, et les savanes du Nouveau-Mexique. Dans ces immenses plaines, dépourvues d’arbres et recouvertes d’herbes hautes et épaisses, il n’est pas rare de rencontrer des troupes de dix mille chevaux, marchant en colonnes serrées, et précédées d’éclaireurs pour reconnaître l’ennemi et avertir du danger.
Le second exemple est celui du magot, singe du genre macaque, originaire d’Afrique. Il s’est multiplié sur le rocher de Gibraltar, du côté de la mer, d’individus échappés, selon toute apparence, de la domesticité ; à moins qu’on n’aime mieux supposer, avec quelques naturalistes, que cette espèce y existait avant la séparation des deux continents.
Enfin, nous citerons, pour troisième et dernier exemple, l’invasion du surmulot, gros rat de l’Inde et de la Perse, qui, arrivé en France par la voie du commerce, seulement en 1750, s’est répandu depuis dans toute l’Europe, et en a presque chassé le rat ordinaire, qu’il surpasse en vigueur.