Alliance de mots

  • Encyclopédie de famille

Alliance de mots. Réunir deux mots qui par les idées contraires qu’ils éveillent semblent s’exclure réciproquement ; faire que par l’art avec lequel on a choisi ces deux termes et le sens qu’on leur donne, ils s’adoucissent et se modifient mutuellement de manière à présenter réunis un sens différent de celui qu’ils auraient eu séparés, c’est ce qu’en littérature on appelle alliance de mots. L’alliance de mots supplée aux expressions déterminées quand elles nous manquent pour peindre notre pensée, et sert à en définir toutes les nuances, comme l’alliance des couleurs supplée sous le pinceau du peintre habile aux tons composés qui ne lui sont point donnés par les couleurs primitives. Il y a dans quelques-uns de nos grands poètes des exemples de ce que peut l’habile réunion de deux mots contraires ; Corneille a écrit ce vers, tant admiré par Racine :

Et monté sur le faite, il aspire à descendre.

On connaît ce vers dans Phèdre :

Déjà de l’insolence heureux persécuteur.

Voici encore un très bel exemple, pris dans le Glorieux de Destouches :

J’entends, la vanité me déclare à genoux
Qu’un père malheureux n’est pas digne de tous.

Quel que soit l’attrait de cette figure, il faut toujours penser que l’abus en serait dangereux, et qu’il faut autre chose que la réunion bizarre de deux termes totalement contraires pour former une alliance de mots : elle exige du tact dans le choix, dé la retenue dans le nombre et de la noblesse dans l’emploi.