Antechrist

  • Encyclopédie de famille

Antechrist. Dans les derniers siècles qui précédèrent la naissance du Christ, les Juifs associèrent à leur idée du Messie, envoyé pour assurer le bonheur de leur nation, celle d’un Antimessie, qui devait faire beaucoup de mal avant la venue du vrai Messie. Divers livres du Nouveau Testament font mention de l’Antechrist comme d’un ou de plusieurs faux prophètes se faisant passer pour le vrai Christ, afin de tromper le monde ; mais ce n’est que dans l’Apocalypse qu’il est représenté comme un puissant souverain, ennemi du christianisme, dont l’apparition doit précéder la fin des temps et annoncer le dernier retour du Messie sur la terre. Ce sera Satan fait homme, suivant certains Pères de l’Église. Ce sera un démon revêtu d’une chair apparente, d’après saint Jérôme. Il naîtra précédé de signes extraordinaires, tant au ciel que sur la terre, mais son règne ne durera que trois ans et demi. Il est vrai qu’il sera signalé par d’atroces barbaries. Énoch et Élie, qui ne sont pas encore morts, essayeront vainement de le combattre : ce tyran les fera périr à l’endroit même où Jésus-Christ a été crucifié. Après toutes ces horreurs, après que les peuples auront été plongés dans la désolation, le Christ foudroiera son ennemi par un effet de sa toute-puissance.

Les chrétiens conservèrent dans les premiers siècles cette croyance d’un ennemi redoutable de l’Église, dont la venue s’annoncerait par les persécutions qu’elle aurait à subir, et qui précéderait le retour du vrai Christ, espéré par les chiliastes. Cette opinion, adoptée pendant longtemps avec les diverses interprétations qu’en avaient données les Pères de l’Église, et avec la croyance du règne de mille ans, qui devait succéder aux persécutions endurées sous le règne de l’Antéchrist, resta accréditée jusqu’à ce que l’année 1000 se fût écoulée sans avoir vu réaliser les prophéties si souvent reproduites. Cette circonstance refroidit le fanatisme des chiliastes. Il est vrai que l’interprétation de l’Apocalypse donnait toujours lieu à de nouveaux calculs en faveur de l’apparition de l’Antéchrist ; les esprits les plus hardis et les plus sérieux, le génie lui-même, ne se sont pas abstenus de traiter cette grave matière. Bossuet, commentant certains passages de l’Écriture et surtout le chapitre XXIV de l’Évangile selon saint Matthieu, a cru devoir se prononcer en faisant de ce personnage un violent persécuteur. Les vaudois, les wicléfiies, les hussites, et jusqu’à Luther et ses sectateurs, accusèrent le pape de s’être élevé au-dessus et contre le Christ et le traitèrent d’Antéchrist. Les catholiques, de leur côté, donnèrent ce titre à Luther et aux autres réformateurs. Grotius soutint que Caligula était l’Antechrist. Bien avant lui, et jusqu’au cinquième siècle, on avait cru, sur divers points, que Néron n’était pas mort et qu’il reviendrait sous la forme de l’Antechrist. L’Antechrist, dans l’Église d’Orient, c’était Mahomet, les Sarrasins et les Turcs. Les musulmans ont l’idée d’un Antéchrist qui sera vaincu, avec l’aide du Christ véritable, par l’iman Mahadi ; après quoi le christianisme et l’islamisme ne formeront plus qu’une seule et même religion. C’est ainsi que l’idée d’Antechrist, comme symbole d’un ennemi dangereux de la véritable Église, se perpétua sous différentes formes. Le nom de l’Antéchrist fut donné par des fanatiques à Napoléon pendant les années où il imprimait la terreur à l’Europe.

Parmi les Juifs s’est aussi conservée, depuis la destruction de Jérusalem par Titus, la singulière prophétie d’une lutte qui doit avoir lieu entre le vrai Messie et l’Antimessie, qu’ils nomment Armillus ; celui-ci, qui naîtra à Home, se donnera pour le Messie et pour Dieu, et trouvera beaucoup de partisans dans les États du pape. Le premier Messie, fils de Joseph, le vaincra d’abord, mais finira à son tour par succomber sous ses coups ; alors le second Messie, fils de David, battra et tuera Armillus ; après quoi le règne des chrétiens et des païens cessera pour faire place à la domination éternelle du peuple juif.