Anathème
- Dictionnaire infernal
Anathème. Ce mot, tiré du grec, signifie exposé, signalé, dévoué. On donnait chez les païens le nom d’anathèmes aux filets qu’un pêcheur déposait sur l’autel des nymphes de la mer, au miroir que Laïs consacra à Vénus, aux offrandes de coupes, de vêtements, d’instruments et de figures diverses. On l’appliqua ensuite aux objets odieux que l’on exposait dans un autre sens, comme la tête ou les dépouilles d’un coupable ; et l’on appela anathème la victime vouée aux dieux infernaux. Chez les Juifs l’anathème a été généralement pris ainsi en mauvaise part ; chez les chrétiens c’est la malédiction ou l’être maudit. L’homme frappé d’anathème est retranché de la communion des fidèles.
Il y a beaucoup d’exemples qui prouvent les effets de l’anathème ; et comment expliquer ce fait constant, que peu d’excommuniés ont prospéré ? — (Voyez : Excommunication).
Les magiciens et les devins emploient une sorte d’anathème pour découvrir les voleurs et les maléfices : voici cette superstition. Nous prévenons ceux que les détails pourraient scandaliser qu’ils sont extraits des grimoires. — On prend de l’eau limpide, on rassemble autant de petites pierres qu’il y a de personnes soupçonnées, on les fait bouillir dans cette eau, on les enterre sous le seuil de la porte par où doit passer le voleur ou la sorcière, en y joignant une lame d’étain sur laquelle sont écrits ces mots : Christus vincit, Christus regnat, Christus imperat. On a eu soin de donner a chaque pierre le nom de l’une des personnes qu’on a lieu de soupçonner. — On ôte le tout de dessus le seuil de la porte au lever du soleil ; si la pierre qui représente le coupable est brûlante, c’est déjà un indice. Mais, comme le diable est sournois, il ne faut pas s’en contenter ; on récite donc les sept psaumes de la pénitence avec les litanies des saints ; on prononce ensuite les prières de l’exorcisme contre le voleur ou la sorcière ; on écrit son nom dans un cercle, on plante sur ce nom un clou d’airain de forme triangulaire, qu’il faut enfoncer avec un marteau dont le manche soit de bois de cyprès, et on dit quelques paroles prescrites à cet effet. Alors le voleur se trahit par un grand cri.
S’il s’agit d’une sorcière, et qu’on veuille seulement ôter le maléfice pour le rejeter sur celle qui l’a fait, on prend, le samedi, avant le lever du soleil, une branche de coudrier d’une année, et on dit l’oraison suivante : « Je te coupe, rameau de cette année, au nom de celui que je veux blesser comme je te blesse. » On met la branche sur la table, en répétant trois fois une certaine prière[1] qui se termine par ces mots : Que le sorcier ou la sorcière soit anathème, et nous saufs !…